“Belle”, un conte pop indigeste
Mamoru Hosada a beaucoup de modèles : il est autant capable de chasser sur les terres de Ghibli (Miraï ma petite sœur, simili-Totoro) dont il est parfois considéré comme le meilleur héritier (même si leur tentative de collaboration s’est soldée par un gros différend artistique sur Le Château ambulant, qu’il a failli réaliser), que sur celles de Satoshi Kon dont il se rapproche plus volontiers par son goût des récits cérébraux et de la question du virtuel (Summer Wars).
Mais il ne reproduit jamais tout à fait la grâce de l’un, ni les vertiges de l’autre, et c’est particulièrement le cas avec ce film dont on ne peut s’empêcher de penser qu’il vient surtout bassement faire du gringue au public adolescent, en plongeant la tête la première dans tout ce qui pourrait facilement le séduire – à savoir une parabole sur la célébrité en ligne et les réseaux sociaux, soulevée par des leviers tragiques lourdingues (le deuil, les violences intrafamiliales) et trempée dans une bassine de codes visuels et musicaux certainement au goût des zoomers à tendance emo, mais de pas grand monde par ailleurs.
Lourdeur et décadence
Difficile de se sentir réellement concerné par la tambouille pop-dépressive qui en résulte, que ce soit dans ses poussées d’acné onirico-virtuelles (épouvantables concerts dans le métavers à dos de baleine volante) ou dans ce que Hosada semble vouloir nous présenter comme de grands moments de drame contemporain (un personnage de père violent d’une subtilité pachydermique).
On se contente de regarder de loin et avec un peu de terreur quel genre de double fantasme pervers le film vend à son public : un mélange complaisant de célébrité quasi-religieuse et d’infinie détresse, de suprématie et d’auto-apitoiement. Trop vieux pour ces conneries.