ENQUÊTEFacebook Files | Dans des documents internes de l’entreprise, ses ingénieurs avouent leur incompréhension face à un code informatique aux effets imprévus, qui fait du réseau social une machine complexe, difficile à maîtriser.
C’est peut-être le principal sentiment qui émerge à la lecture des « Facebook Files ». Parmi ces milliers de pages de documents internes à Facebook, récupérés par Frances Haugen, une ancienne employée, et transmis par une source parlementaire américaine à plusieurs médias, dont Le Monde, de nombreux passages semblent indiquer que Facebook ne comprend plus, ou mal, ce que font ses propres algorithmes. Et que son réseau social est devenu une machine difficile à contrôler.Les « Facebook Files », une plongée dans les rouages de la machine à « likes »
Les « Facebook Files » sont plusieurs centaines de documents internes à Facebook copiés par Frances Haugen, une spécialiste des algorithmes, lorsqu’elle était salariée du réseau social. Ils ont été fournis au régulateur américain et au Congrès, puis transmis par une source parlementaire américaine à plusieurs médias, expurgés des informations personnelles des salariés de Facebook. En Europe, ces médias sont, outre Le Monde, le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung, les chaînes de télévision WDR et NDR, le Groupe Tamedia, Knack, Berlingske et l’OCCRP.
Ils montrent que Facebook consacre davantage de ressources à limiter ses effets néfastes en Occident, au détriment du reste du monde. Ils attestent que ces effets sont connus en interne mais les signaux d’alerte pas toujours pris en compte. Enfin, ils prouvent que les algorithmes de Facebook sont devenus d’une complexité telle qu’ils semblent parfois échapper à leurs propres auteurs.
C’est notamment le cas pour un algorithme crucial, chargé de « classer » les messages qui s’affichent dans le fil d’actualité des utilisateurs : Facebook utilise une multitude de signaux, des plus simples – le nombre de personnes abonnées à une page – aux plus complexes – l’intérêt que les « amis » d’un utilisateur ont manifesté pour un sujet – afin d’attribuer un « score » à un message. Plus ce score est élevé, plus il a des chances d’apparaître dans le fil d’actualités.