“La Déesse des mouches à feu” : un teen movie d’une grande justesse
Un drame fougueux sur le passage à l’âge adulte d’une jeune adolescente dans le Québec rural des années 1990
La mouche à feu, c’est l’autre nom que l’on donne à la luciole au Québec. Difficile de trouver meilleur animal-totem pour raconter le quotidien de Catherine que cet être fragile et éphémère qui détient pourtant à lui seul le pouvoir d’éveiller la nuit.
Âgée de 16 ans, la jeune adolescente qui doit accepter le divorce de ses parents est autant lumière qu’obscurité. Adapté du roman éponyme de Geneviève Pettersen, lui-même profondément influencé par le célèbre Moi, Christiane F, 13 ans, droguée, prostituée (dont on voit apparaître un exemplaire dans le film), le long métrage d’Anaïs Barbeau-Lavalette, est un troublant récit d’apprentissage.
>> À lire aussi : “Une vie démente”, un bel équilibre entre légèreté et noirceur
Kelly Depeault, magistrale
En pleine révolte, autant contre le monde que contre elle-même, Catherine se retrouve prise avec sa bande d’ami·es dans un cycle qui mêle l’apathie à la consommation de drogue et de sexe. L’autodestruction et les excès deviennent alors les antidotes parfaits pour parvenir à un semblant de liberté, un aperçu de joie, même si extrêmement fugaces. Volontairement répétitif, éreintant plusieurs fois, le film est particulièrement éclairant et pertinent dans sa façon de mettre en scène les motifs cycliques que provoquent l’addiction sur les corps.
Pour incarner ce corps en révolte, la jeune comédienne Kelly Depeault est tout simplement stupéfiante. Capable de passer d’une agitation émotionnelle à une froideur calme en une fraction de seconde, elle crève l’écran. Si l’on pourra reprocher au film, un certain calibrage du genre avec notamment quelques scènes programmatiques qui nous semblent avoir déjà été vues mainte fois ailleurs, ce portrait aux multiples facettes capture avec justesse les profondeurs de la dépression, de la dépendance, de l’émerveillement et du désir de Catherine.
La déesse des mouches à feu réussit également par son traitement à la fois poétique et cru à tisser un témoignage particulièrement cathartique sur cette révolte qu’est l’adolescence.