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ABEILLES – Dans une indifférence générale, toutes les abeilles de France sont sorties de leurs ruches le 31 décembre 2021, de Perpignan à Strasbourg. Pas pour célébrer l’arrivée de la nouvelle année; non, tout simplement parce qu’en dessus de 10 ° C, leur nature, comme celle d’autres insectes, les pousse à sortir butiner pour vivre. Elles ont fait globalement un tour pour rien; nos paysages à cette période sont vides de fleurs à l’exception ponctuelle de quelques jardins. Anecdotique certes, mais quand ce type de situation se produit et perdure après une année climatique bien mauvaise pour la végétation et toute la biodiversité qui en vit, l’anecdote tourne au vilain.
Comportements perturbés et changements climatiques
Entre gel tardif, été médiocre, peu lumineux, pluvieux, et propice aux pathogènes, 2021 aura ainsi fourni de piètres récoltes de fruits et de vin, et la plus faible récolte de miel jamais enregistrée (7000 tonnes pour 19.000 tonnes en année normale); et le record de chaleur qui a fini l’année permet de signaler que les hivers doux font plus mal que les froids qui immobilisent les abeilles dans les ruches: les réserves des ruches fondent plus vite pour cause de balades.
Les apiculteurs des régions très impactées par le réchauffement climatique, comme la Californie, le savent bien, qui envoient leurs abeilles hiverner à 400 Km plus au nord, ou qui leur louent des chambres froides pour leur faire croire que rien n’a changé! Alors que d’évidence, le réchauffement climatique et ses dérèglements ont bien modifié leur vie et la nôtre de façon implacable: Il fait plus chaud, on empile les records; nous subissons plus souvent des périodes de canicules, de sècheresses, ou de forts épisodes pluvieux…
Pour elles, toutes les dates des floraisons ont fortement avancé, tout comme celle des vendanges, leur laissant de longs étés pauvrement fleuris, et des productions de pollen et de nectar, dont dépendent bien d’autres ″mangeurs de fleurs’’, qui font le yo-yo.
Double peine pour la végétation
Pour notre végétation, c’est en fait double peine tant nos paysages ont été appauvris par nos activités, entre urbanisation diffuse, artificialisation d’espaces et multiplication d’infrastructures, disparition des haies champêtres, nettoyage-broyage des abords routiers et des délaissés, spécialisation de nombreux terroirs agricoles en monocultures…
Nous avons créé, par endroits, des déserts de vie et, partout, exagérément simplifié nos flores à coup de gazon – maïs. La réduction drastique des habitats et des ressources végétales, dont dépendent quantité d’insectes et autres animalcules qui sont la base de la pyramide sur laquelle reposent tant de vies est la grande responsable des 30% de pertes que signalent les chercheurs pour nos oiseaux, nos batraciens et finalement toute notre biodiversité, sur ces cinquante dernières années. Le réchauffement, sauf réaction rapide, ne peut qu’accélérer cette mécanique maintenant bien connue, et encore à l’œuvre.
Pointer du doigt l’agriculture industrielle et les pesticides est bien commode vue la multiplicité des causes et la complexité du problème paysager à résoudre; lequel demande d’autres solutions que le seul retour nostalgique aux haies d’antan et au végétal local, compréhensible, mais bien insuffisant. Dans l’équation d’équilibre ’’Climat, sol, flore, biodiversité’’ quand le climat change, la variable à ajuster pour conserver la plus riche biodiversité possible est bien sûr la flore.
Les végétaux ont déjà commencé leur migration avec ou sans nous: les herbes facilement, bien sûr, mais les arbres aussi. Le Chêne vert va passer Paris, le Hêtre va quitter la Basse Bretagne… Des icônes du Sud vont monter, dont l’olivier, mais il n’y aura pas méditerranéisation du pays (Des hivers rigoureux toujours possibles joueront le juge de paix et les orangers resteront des curiosités à Bordeaux) ni grand remplacement des flores (il y aura encore des aubépines, des tilleuls… Mais qui fleuriront de plus en plus tôt). Ce qui est sûr, c’est que notre flore fera de moins en moins bien le job.
Des solutions
Alors, occupons-nous d’elle, en l’enrichissant avec des arbres et arbustes capables de fleurir dans les trous de l’été (sophora japonica, koelreuteria, tetradium, lagerstroemia…) et durant nos hivers de plus en plus doux (Mahonia, viorne-tin, arbousier, lonicera fragans…). Ces végétaux, d’ici ou d’ailleurs (majoritairement issus de la riche flore tempérée d’Asie) sont chez nous depuis longtemps, acclimatés dans les parcs, arboretum et dans nos villes: il faut les glisser partout, dans une palette adaptée au temps qui vient vite.
«Le paysage dans tous les programmes de cette année électorale, avec le slogan écouté derrière le buzz de ce 31/12/2020: ‘Des fleurs partout et tout le temps’. Chiche!»
Et occupons-nous enfin de nos paysages dont la déshérence est patente: Les grands arbres champêtres font illusion, ils sont sans descendance, et on n’en replante pas assez pour éviter la rupture à venir. Revoyons nos pratiques paysagères: moins de gazon et de surfaces inertes, moins de nettoyages des délaissés et des abords routiers qui sont, ou vides ou gagnés par des sauvageons. Les ailanthe et acacia ont maintenant rejoint Orléans depuis la banlieue parisienne, en prenant l’autoroute A10. (On les traite d’invasifs alors que ce sont de grands marcheurs dynamiques qui empruntent plus vite les espaces broyés que le paysagisme version BTP leur offre un peu partout). Et plantons très diversifié, des haies, des forêts, et aussi des bosquets, comme autant d’oasis dans nos déserts sans fleurs.
La sortie des abeilles était bel et bien une grande manif pour nous signifier qu’il faut planter, avec une palette adaptée et des pratiques respectueuses de la nature. Le paysage dans tous les programmes de cette année électorale, avec le slogan écouté derrière le buzz de ce 31/12/2020: ″Des fleurs partout et tout le temps″. Chiche!
À voir également sur Le HuffPost: Au Chili, ces apiculteurs font manifester leurs abeilles dans la rue
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