Sylvère Lotringer, éditeur et écrivain, est mort

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Sylvère Lotringer, en 2014.Sylvère Lotringer, en 2014.

Un vrai passeur toujours s’efface devant ce qu’il fait passer ; il relie et fait converger tout en étant lui-même au bord de disparaître. Avec Sylvère Lotringer – qui pensait en ces termes, et est mort le 8 novembre dans sa résidence de Baja California, au Mexique – c’est un vrai passeur qui a disparu. Et quel passeur ! Le rayonnement nord-américain de la pensée française depuis un demi-siècle (dont cette « French Theory » qu’il rassembla, publia et baptisa même) lui doit beaucoup, de même que la popularité, dans certains milieux français, des avant-gardes culturelles américaines de la fin du XXe siècle. Et au-delà, il favorisa l’étonnante diffusion des théories philosophiques les plus subversives, ou les plus intempestives, dans des milieux connexes – artistiques, militants, universitaires, contre-culturels, qu’il aura contribué à inspirer et rapprocher les uns des autres.

Sylvère Lotringer est né à Paris le 15 octobre 1938, de parents juifs polonais émigrés de Varsovie en 1930. Confié par sa mère à des proches, il a passé la seconde guerre mondiale dans l’est parisien en « enfant caché » – comme beaucoup d’autres de sa génération, dont la philosophe Sarah Kofman et l’écrivain Georges Perec, avec lesquels il partagera le souvenir traumatique de cette enfance recluse.

En 1949, sa famille et lui émigrent en Israël mais en reviennent un an plus tard ; il intègre à 12 ans le mouvement de jeunesse sioniste de gauche Hashomer-Hatzair, dont il devient l’un des responsables parisiens. Encore lycéen, il participe, avec Georges Perec, au projet de journal La Ligne générale. Entré à la Sorbonne en 1958, il y suit des études de lettres, y crée la revue L’Etrave, y rejoint l’UNEF, menant les mobilisations étudiantes contre la guerre d’Algérie – c’est pour échapper à la conscription obligatoire qu’il fuit aux Etats-Unis une première fois, en 1962, ou qu’il part enseigner, entre 1965 et 1967, à l’Alliance française d’Erzurum, en Turquie.

Barbancourt

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Une marque dans la vie intellectuelle

Il s’inscrit en doctorat en 1964 à la VIe section de l’Ecole pratique des hautes études, où il soutiendra sa thèse de doctorat, codirigée par Roland Barthes et Lucien Goldmann, sur l’œuvre romanesque de Virginia Woolf, alimentée de première main par sa proximité avec Leonard Woolf (le mari de l’autrice) mais aussi l’écrivaine Vita Sackville-West et le poète T.S. Eliot, avec lesquels il publiera de longs entretiens dans Les Lettres françaises.

Après une année d’enseignement en Australie puis à Swarthmore College (une université progressiste de Pennsylvanie), il est recruté en 1972 par le Département de littérature française et comparée de l’université Columbia, à New York, où il sera titularisé et enseignera toute sa vie – avant que s’ajoutent, beaucoup plus tard, des séminaires réguliers au California Institute for the Arts, à Los Angeles, ou à l’European Graduate School de Saas-Fee, en Suisse. Ses cours de philosophie française à Columbia, très suivis, ont pu avoir une influence décisive au fil des générations d’étudiants, parmi lesquels la future cinéaste Kathryn Bigelow, les critiques Tim Griffin et John Kelsey ou la poétesse Ariana Reines.

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